D’un siècle à l’autre….le caractère universel du monde.
Des constructeurs de la Tour de Babel jusqu’aux grands conquérants, en passant par les penseurs et politiques d’aujourd’hui, l’idée d’universaliser le monde est une vieille histoire. Mais en dehors de son caractère idyllique, est-ce une utopie ou une réalité concrète ?
De tout temps, des hommes ont associé leurs efforts à des fins d’universalisation, dans l’objectif suprême de ne faire figurer qu’un « grand village planétaire » au patrimoine de l’humanité. D’Alexandre le Grand à Napoléon Ier, bien des rois se sont engagés dans ce projet illusoire, pour finalement obtenir des effets opposés. Le récit biblique établit que les desseins des instigateurs de la Tour de Babel, véritables pionniers universalistes, n’étaient que le prélude à ce concept hégémonique et arrogant, où tous les hommes seraient affranchis de la Providence divine, unis pour le pire. Cependant, l’action d’universaliser pose des interrogations : quel est le but poursuivi, quelles sont la morale et la justice appliquées ? Comment justifier une telle volonté normative et sous quelles bannières la placer ? La poursuite de l’universalisme peut-elle, sans danger, dépendre du pouvoir absolu des hommes ? Ne doit-on pas plutôt penser que cet universalisme doit se référer à la création de l’homme par un unique et même D.ieu, et que par conséquent ces hommes sont libres et égaux, unis dans un destin commun ? C’est ce que déclare la Bible en faisant fusionner D.ieu le créateur au D.ieu des peuples.
Depuis la Septante, version grecque du Pentateuque réalisée sous Ptolémée II, et la Vulgate, sa version latine, on constate que les écrits bibliques ont aussi bien acquis une dimension internationale, que gagné en crédibilité envers les citoyens du monde. Désormais, l’idée que D.ieu est immanent et transcendant a pénétré le monde. Il serait impossible de citer tous ceux qui ont adhéré au message biblique, plébiscité comme la seule déclaration universelle, soit en adhérant à ces lois, soit en observant les 7 lois Noa’hides. Citons simplement Anatole Leroy-Beaulieu : « La Révolution n'a été qu'une application de l'idéal qu'Israël avait apporté au monde. L'idée de la justice sociale est une idée israélite. (…) Pour trouver la source première de 1789 (…), il faut remonter, par delà l'antiquité classique (…) jusqu'à la Bible, à la Thora et aux Prophètes. ».
Et si le peuple juif est le dépositaire de la volonté divine collective, tous les citoyens du monde ont leur part de responsabilité, de moralité et de foi dans l’effort d’universalité en adhérant aux 7 lois Noa’hides, comme l’explique le rabbin Elie Bénamozegh, auteur de « Israël et l’Humanité » : « Le particularisme juif tend à des fins universelles ; il n’a pas d’autre raison d’être que la foi au Dieu unique, pas d’autres buts que l’établissement de son règne chez tous les peuples ».
Au 1er siècle, Rome est le théâtre de divergences entre la fascination du pouvoir absolue, la réforme des écrits bibliques et le chemin sans compromis que trace la Bible. D’Antonin, qui se convertira au judaïsme, à Julien, qui décrètera en 361 que le Temple de D.ieu soit reconstruit, en passant par les himyarites et les khazars, l’idée qu’un seul D.ieu fait exister le monde gagne les esprits. Les adeptes de lois universelles apparaissent à l’horizon. En 1640, inspiré par les lois bibliques, John Selden, juriste et membre du Parlement anglais publiera « Le droit national et le droit des gens d’après les Hébreux ». En 1777, Jean Antoine Fabre, Ingénieur en chef des Ponts et Chaussées accepte les lois Noa’hides suite à sa rencontre avec le célèbre Rabbin Haïm Yossef David Azoulay. Chateaubriand écrira : « (...) Voilà les lois que l’Éternel a gravées, non seulement sur la pierre du Sinaï, mais encore dans le cœur de l’homme. On est frappé d’abord du caractère d’universalité qui distingue cette table divine des tables humaines qui la précèdent. C’est ici la loi de tous les peuples, de tous les temps. » Ministre de l’Éducation (1863), Victor Duruy constatera : « Les Juifs étaient pour l’humanité tout entière comme la caste sacerdotale du culte de l’Éternel, le Dieu universel, qu’elle devait révéler au monde quand les temps en seraient venus ». Au-delà des controverses à son sujet, le journaliste Aimé Pallière écrira : « Le judaïsme est le foyer, le centre de la religion universelle, et les autres cultes se trouvent rattachés à lui, et par conséquent légitimes, dans la mesure où ils sont fidèles à ses principes ».
En 1980, le Pr John Wheeler publie l’article « Delayed Choice Experiment », qui sera lu devant la Royal Society, puis devant l’American Philosophical Society. Il compare le processus quantique élémentaire à un acte de création ex-nihilo qui serait le résultat de la participation d’un observateur pour chaque phénomène réel. Il en résulte que sans la présence de l’homme, il n’y a ni univers, ni lois physiques. Wheeler trouve une allusion à cette approche dans des textes bibliques. Selon Wheeler, « l’humanité - qui joue donc, selon la Théorie quantique, le rôle le plus central dans le cosmos - a besoin d’un penseur d’une telle envergure qu’il pourra révéler le sens global de l’existence de notre univers, et donc jouer le rôle de Guide au sein d’une réalité souvent pleine de mystères ». Le caractère universel de la Bible devient donc indéniable. C’est ce que proclame le prophète Isaïe : « Le monde n’a pas été créé pour le chaos, mais pour qu’on y réside ». A nous, avec les 7 lois de Noé, de faire que ce monde soit une résidence pour D.ieu et que l’humanité y vive selon Sa volonté.
Photos : La tour de Babel par Breughel, l’empereur Antonin Marc-Aurèle, le juriste John Selden et le physicien John Wheller.
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